Oy - St. Lô - 22 novembre 2014 - Le Tamanoir, Gennevilliers

Les performeurs de Oy nous transportent par delà la stratosphère, dans un futurisme spatial où les extraterrestres ont appris de la Terre en observant les villes Africaines.
St. Lô c'est l'urgence de l'émotion, l'urgence et l'audace du groove d'une chanteuse que les machines n'arrivent pas à rendre froid.



Oy

Un concert de Oy c'est une performance, une plongée profonde dans le psychédélisme. La même folie créatrice que celle des années 60 avec des projections colorées en fond de scène, des personnages excentriques qui semblent nous ignorer depuis la scène et des bruitages. des tas de bruitages, de sources sonores indéfinies qui nous emmènent tantôt dans des contrées infinies inventées, étrangères, tantôt dans notre quotidien, dans les sons de tous les jours.

Pour la performance c'est Lleluja-Ha (aka Marcel Blatti), le batteur qui s'en charge. Revêtu d'un costume réalisé par la créatrice allemande Victoria Behr, Lleluja-Ha est un personnage étrange au visage entièrement masqué par un losange fait du même tissu que le reste de sa tenue qui rappelle les boubous africains. Le rythme qu'il donne c'est le chemin, la route que nous empruntons pour explorer l'univers parallèle et distendu de Oy.

Joy Frempong est la jeune Suisso-Ghanéenne qui se cache derrière tout un fatras de machines, ordinateurs et micros. Diffusant tour à tour des samples de bruits de rue, de klaxons, jouant avec sa voix dans des boucles monumentales distordues par des effets électroniques. Ce soir elle n'était absolument pas costumée, elle portait un sweater gris dans lequel on aurait passé son samedi après midi devant la télé... Elle devra nous apprendre que ses bagages se sont perdus entre la Hollande et la France. Le spectacle n’en est pas moins décalé et saisissant.

Les chansons de Oy parlent de l'Afrique, la chanson en français déjà "Bienvenue chez toi" qui est un hommage à l’hospitalité, mais également à travers les rythmes, les bruits de villes samplés, les projections diffusées en fond de scène qui figurent des motifs qui rappellent ceux des costumes traditionnels quand ne sont pas tout simplement projetées des promenades filmées à travers une capitale africaine que je ne saurais pas identifier. Je m'évade dans la rêverie que propose Oy, sa musique, son univers visuel et je me demande si on ne pourrait pas définir leur musique comme de la science fiction musicale...


St.Lô

St.Lô c'est un mystère. le mystère de l'alchimie qui a pu unir 3 Bretons et une rappeuse féministe de Brooklyn? Et pourquoi ont-il choisi un nom de patelin normand ?!
Une autre question viens rapidement à l'auditeur : qu'est-ce que joue ce groupe? quel style?

Les mélodies sont accrocheuses mais énergiques. Les beats sont électro mais groovent. Le chant est féminin mais furieux. Bourré d'émotion soul mais rappé. Alors où sommes nous? Aux frontières du trip hop, du rap, du rock, du dub, de la soul...

C'est Hanifah Walida (aka. Shä-Key), la chanteuse qui nous apporte la solution "We are in here together, in one place at one time " répète-t-elle entre les morceaux. Ça doit être ça le secret de St.Lô, se concentrer sur l'Ici, le Maintenant, et vivre un moment avec le public. Ne pas chercher de définitions ou à refaire exactement ce qui à été fait. Faire ce qui leur plaît chacun, et le faire ensemble. Tricky s'est-il posé la question de savoir si il faisait du trip hop quand il a inventé le trip hop?

Ce soir St.Lô se produisent à 3 au lieux de 4 habituellement, ça ne semble pas gêner les musiciens. Ça ne gêne pas non plus le public qui est venu pour admirer la  puissance et la présence de Hanifah Walidah. Charismatique, androgyne, elle virevolte sur scène dans une frénésie spontanée.

C'est émouvant de réentendre In the Pines (Where did you sleep last night). Déjà parce que c'est un super blues dont l'histoire se perd dans celle de l’Amérique, aux frontières avec la folk music. Ensuite parce que les paroles sont prenantes. Aussi parce que j'ai écouté en boucle la version de Nirvana sur leur Unplugged in NY, mais surtout parce qu'elle me rappelle une autre version radicalement différente, tout a fait acoustique, sans amplification jouée ici même au Tamanoir il y a quelques années par Madjo. Les deux versions de la même chanson se répondent dans mon esprit, celle rappée sur de l'électro-rock, la version soul, sexuelle, morbide hantée de St.Lô et celle doucement susurrée, la berceuse de Madjo.